vendredi 10 janvier 2014

11 - HAUTEUR DE VUE

A Albert, petite ville de la Somme, est sise une basilique. Une Vierge dorée, entrée dans l'Histoire lors de la Grande Guerre, domine l'édifice. Pour les albertains, braves gens du nord, la séculaire dorure est devenue invisible.

Moi j'y vois mille feux, une auréole, une perle d'or au-dessus de la cité. J'aime à lever les yeux au ciel, à la rencontre de l'hôte des nues.

Mon regard embrasse ciel et cime, et face à cet horizon vertigineux je chancelle avec délices, isolé du monde. La flèche mariale de la basilique me désigne des espaces intérieurs sans borne. Enivré d'or et d'azur, j'accède à des hauteurs de conscience inédites.

J'oublie la terre, et pars vers l'Empyrée, saluant oiseaux, astres, désincarnés. Des ailes m'emportent, des anges me parlent, des passants m'observent... Je redescends de mes sommets, le regard à hauteur humaine pour adresser quelque parole à mes frères albertains.

Je leur parle de la pluie, du beau temps. Ils sont contents. Je leur parle de l'état du ciel, de l'état de leurs finances, de l'état de leur voiture. Mais surtout pas de la Vierge dorée. Ils me comprennent, acquiescent, me donnent raison.

Enfin je les laisse au pied de la basilique, songeurs, hilares ou bien placides. Dans leur tête, des rouages de mécanique d'automobile, des inquiétudes météorologiques, des espérances bancaires.

Et je poursuis mon vol, plein de pitié pour mes semblables albertains, l'âme plus légère que jamais, le pas comme une aile, le coeur libéré des dernières pesanteurs terrestres.

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Qui est Raphaël Zacharie de IZARRA ?

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J'ai embrassé tous les aspects du monde, du gouffre le plus bas au sommet le plus glorieux, de l'anodin au sublime, de la bête au divin, du simple caillou à qui j'ai donné la parole jusqu'au fracas galactique que j'ai réduit au silence devant un battement d'aile. Je suis parti du microcosme pour me hisser jusqu'aux astres, sans omettre de poser mon regard à hauteur de vos boutons de chemise. J'ai exploré les vices les plus baroques autant que les vertus les moins partagées, je suis allé sonder les petits ruisseaux mentaux de mes frères humains mais aussi les fleuves nocturnes de mes chats énigmatiques. Je suis allé chercher le feu olympien à droite et à gauche, m'attardant à l'occasion sur mes doigts de pied. J'ai fait tout un fromage de vos mesquineries de mortels, une montagne de mots des fumées de ce siècle, un pâté de sable de vos trésors. L'amour, la laideur, la solitude, la vie, la mort, les rêves, l'excrément, le houblon, la pourriture, l'insignifiance, les poubelles de mon voisin, le plaisir, le vinaigre, la douleur, la mer : tout a été abordé. J'ai embrassé l'Univers d'un regard à la fois grave et loufoque, limpide et fulgurant, lucide et léger, aérien et "enclumier".