lundi 11 décembre 2023

36 - Une averse de mars

Les giboulées faisaient pleurer les toits, chanter les trottoirs et rire les enfants. Le village sous les averses de mars devenait glacial et argenté, sinistre et illuminé.
 
Des gouttières s’écoulait une écume en furie, de mon âme émanait une onde trouble. Sous le charme de la saison âpre et triste, je rêvais en marchant.
 
Dans les flaques je voyais tantôt ma face pâle, tantôt un arc-en-ciel.
 
Les nues sombres alternaient avec un soleil vif et intérieurement je passais du froid tranchant à la glace fondue.
 
En moi, d’immenses étendues blanches, de vastes contrées givrées, des flots de poésie naissante, des vagues de sentiments neufs, des tourmentes de joie, des cumulus de légèreté.
 
Les gouttes sur mon front étaient des baisers pétrifiants, de liquides frissons, des caresses mouillées. Elles ruisselaient jusque dans mon cou pareille à une liqueur gelée.
 
Je me délectais de ces larmes frigorifiées au goût de nuages, de liberté, d’infini. Et sous la grêle je tremblais d’un bonheur humide, austère, clair, fluide et pénétrant.
 
Trempé, grelottant, enivré de neige mourante, je me sentais plus vivant que jamais.
 
Dans les flaques, par-delà mon visage ou les simples jeux de lumière, se reflétait un autre monde.
 
Entre deux déluges de glaçons l’astre faisait étinceler l’eau tout autour de moi.
 
Et je rêvais, rêvais en cheminant...

Et là, en descendant la rue, je montais vers mon paradis.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Qui est Raphaël Zacharie de IZARRA ?

Ma photo
J'ai embrassé tous les aspects du monde, du gouffre le plus bas au sommet le plus glorieux, de l'anodin au sublime, de la bête au divin, du simple caillou à qui j'ai donné la parole jusqu'au fracas galactique que j'ai réduit au silence devant un battement d'aile. Je suis parti du microcosme pour me hisser jusqu'aux astres, sans omettre de poser mon regard à hauteur de vos boutons de chemise. J'ai exploré les vices les plus baroques autant que les vertus les moins partagées, je suis allé sonder les petits ruisseaux mentaux de mes frères humains mais aussi les fleuves nocturnes de mes chats énigmatiques. Je suis allé chercher le feu olympien à droite et à gauche, m'attardant à l'occasion sur mes doigts de pied. J'ai fait tout un fromage de vos mesquineries de mortels, une montagne de mots des fumées de ce siècle, un pâté de sable de vos trésors. L'amour, la laideur, la solitude, la vie, la mort, les rêves, l'excrément, le houblon, la pourriture, l'insignifiance, les poubelles de mon voisin, le plaisir, le vinaigre, la douleur, la mer : tout a été abordé. J'ai embrassé l'Univers d'un regard à la fois grave et loufoque, limpide et fulgurant, lucide et léger, aérien et "enclumier".